Résultats de l’appel d’offres 2020 réserves rapide et complémentaire.

illustration : décryptage marché, analyse des résultats de l'appel d'offres réserves rapide et complémentaire

Résultats de l’appel d’offres 2020 réserves rapide et complémentaire.

Les résultats de l’appel d’offres portant sur la constitution des réserves rapide (RR) et complémentaire (RC) pour l’année 2020 ont été publiés par RTE le 2 août dernier.

Pour la réserve rapide, jamais les prix n’avaient été aussi faibles avec 5 613€/MW (contre 11 959€/MW en 2019).

Les volumes totaux offerts ont également diminué avec  2750 MW proposés (contre 3200MW en 2019), dont environ 750 MW (soit ¾ des volumes finalement retenus) ont été offerts « à tout prix » (c’est-à-dire à 0 ou 1€).

Les chutes de prix les plus spectaculaires s’observent sur le mois de janvier où les prix ont été divisés par 3 par rapport à l’année dernière.

Cela peut apparaître comme une bonne nouvelle pour RTE qui a réussi à diviser par 5 ses coûts de constitution de la réserve rapide entre 2011 et 2020 alors même que ses homologues, et notamment le belge Elia, paient environ 10 fois plus pour un service équivalent. Mais cela a également de quoi sérieusement inquiéter.

 

Plus de risques

Les positions prises par certains acteurs témoignent de prises de risques importantes qui auront nécessairement un impact sur la fiabilité de la réserve et donc sur la sécurité du système électrique.

Plus de CO2

Cette année, beaucoup de moyens de production thermiques (particulièrement carbonés) ont été retenus, dégradant ainsi notre bilan carbone.

Moins de capacités industrielles

Avec ces niveaux de prix et de potentiels biais en faveur de la production (voir infra), les consommateurs industriels tendent à se désengager du mécanisme, alors que ces acteurs (par ailleurs pourvoyeurs d’emplois) auraient pu offrir des capacités fiables et décarbonées.

 

Eléments possibles d’explication

Beaucoup d’acteurs ont tenu à être retenus en réserve rapide au point de déposer leurs capacités « à tout prix ». Cela témoigne :

-Que les acteurs retenus entendent tirer leurs revenus d’autres marchés compatibles avec la RR, et notamment du mécanisme de capacité (dont les trois premières enchères pour l’année de livraison 2020 ont révélé des prix supérieurs à 20 000€/MW).

-Que les acteurs ayant déposé des prix particulièrement bas, déposent des offres correspondant à leurs coûts marginaux, puisque leurs outils, majoritairement thermiques et particulièrement émetteurs de CO2, sont déjà largement amortis.

-Peut-être qu’il y a également eu des comportements peu scrupuleux de la part de certains acteurs (avec de potentiels abus que la CRE ne manquera pas de sanctionner, le cas échéant).

On soulignera aussi que les moyens de production ne jouent pas sur un pied d’égalité avec les opérateurs d’effacement. En effet, les gains pour un producteur se calculent comme la somme des revenus tirés de la RR et des revenus tirés du mécanisme de capacité, tandis que les capacités d’effacement perçoivent les revenus de la RR et du mécanisme de capacité, mais doivent par ailleurs s’acquitter de la part « mécanisme capacité » facturée par leur fournisseur (et équivalant bien souvent au prix du certificat de capacité).

Illustration comparant les revenus générés par les outils de production vs consommateurs. Les outils de production sont avantagés car ils ne paient pas l'obligation de capacité.

Avec de telles stratégies sur le marché de la RR, il sera intéressant de surveiller étroitement la fiabilité des offres « low costs » retenues, ainsi que l’activité sur le marché secondaire de la RR (pour les acteurs qui regretteraient peut-être d’avoir pris des positions trop agressives lors de l’appel d’offres et chercheraient à « sous-traiter » une partie de leurs obligations).

Energy Pool estime que les réserves opérées par RTE (primaire, secondaire et tertiaire) ne sont pas un lieu pour la spéculation et doivent privilégier les capacités fiables et faiblement émettrices de CO2. Il en va de la sécurité de notre système électrique, de notre action en faveur du climat et de la pérennité de notre industrie.

Nous formulerons très prochainement des propositions (s’agissant en particulier des règles de fixation du prix) auprès de la DGEC, de l’ADEME, de la CRE et de RTE pour que la qualité et la fiabilité soient à nouveau privilégiées lors des appels d’offres.